C'est une boîte de Coca light. Sauf qu'à la place de l'appellation originale Diet Coke, on peut lire : Die Coke (approximativement, coca mortel
). Avec, au-dessus du "c" de coke, une carte de l'Afrique qui saigne. Ce logo détourné circule, parmi d'autres, sur le Net. Il est brandi par les associations antisida qui attaquent Coca-Cola pour l'obliger à couvrir les soins de ses employés ou sous-traitants malades du sida.
Sharonann Lynch, animatrice du réseau Health Gap qui coordonne une campagne inter nationale contre la firme d'Atlanta, explique : Coca-Cola s'attend à voir ses profits gonfler de 12 % les quatre prochaines années en Afrique, mais n'accorde une couverture médicale complète qu'à ses 1 200 salariés, alors qu'elle y fait travailler, via ses filiales, 100 000 personnes sur le continent
.
Une série de manifestations et de happenings est prévue aujourd'hui dans plusieurs pays (Thaïlande, Inde, Afrique du Sud, Nigeria, Etats-Unis, Canada). Devançant l'appel, une quarantaine de militants d'Act Up ont bloqué hier, pendant huit heures, l'accès à l'usine Coca-Cola de Grigny (Essonne). Mot d'ordre : Coca ne doit pas laisser mourir ses employés
.
Slogan : Toutes les 10 secondes, 120 000 personnes boivent du Coca-Cola, toutes les 10 secondes, une personne meurt du sida
.
La pression des mouvements antisida sur la responsabilité sociale des entreprises a redoublé d'intensité l'an passé. En avril 2001, les laboratoires pharmaceutiques, sous la pression des ONG, ont dû renoncer à leur procès contre l'Afrique du Sud pour fabrication de génériques (Libération du 19 avril 2001). Les grandes firmes ont multiplié les déclarations face à une société civile très mobilisée.
Coca-Cola a conclu en juin 2001 un partenariat
avec l'Onusida et s'est engagé à fournir à ses 1 200 employés directs des antirétroviraux. Pas de quoi satisfaire les militants. Irrités par le tout-communication
, les campagnes de pub
, les réseaux ont, en avril 2002, lancé leur campagne contre Coca-Cola en perturbant l'assemblée générale du groupe, à New York. Les activistes ont été d'autant plus remontés qu'en août, cédant aux appels des syndicats et des ONG, les géants miniers sud-africains ont fini, eux, par céder, acceptant de prendre en charge tous leurs salariés malades, à partir de 2003.
La pression a redoublé sur Coca-Cola, notamment lors du sommet de l'ONU sur le sida à Barcelone. C'est à cette date qu'on a décidé de lancer notre journée d'action contre Coca
, dit Gaëlle Krikorian, d'Act Up. A l'époque, même le Fonds global contre les pandémies a suggéré à Coca-Cola de passer des paroles aux actes. En fournissant, par exemple, des préservatifs avec ses canettes. Fin août, c'est Richard Holbrooke, ancien ambassadeur américain à l'ONU, qui a plaidé pour que la firme fournisse un traitement à l'ensemble de son personnel en Afrique. De guère lasse, la firme d'Atlanta a jeté le 26 septembre les bases d'un programme de 4 millions de dollars par an pour prendre en charge 24 000 de ses 60 000 employés (officiels) dans 19 pays africains. Insuffisant, selon les activistes. Les incertitudes demeurent sur l'efficacité, l'étendue et la rapidité de l'initiative
, dit Gaëlle Krikorian. Coca ne veut couvrir que 50 % des coûts de prise en charge médicale, laissant 40 % aux sous-traitants et 10 % à l'employé
.
La coalition anti-Coca demande aussi à au numéro 1 mondial du soda de prendre en compte les besoins des autres pays en développement. Même si le continent noir concentre 28 des 40 millions de malades, le sida explose aussi en Asie, où Coca-Cola n'a rien prévu. La lutte contre le sida passe par la mobilisation de tous : gouvernements, ONG, entreprises
, se défend Eric Laurencier, de Coca-Cola France. Hier, le groupe annonçait un bénéfice net de 1,16 milliard de dollars au troisième trimestre 2002. De quoi mobiliser un peu plus les militants antisida.
Source : Libération
Auteur :
Christian Losson
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