Bruxelles : de notre correspondante Alexandrine Bouilhet
Les adversaires du projet de Constitution européenne se sont réunis, hier, à Prague, pour dégager une position commune avant l'ouverture de la Conférence intergouvernementale (CIG), le 4 octobre, à Rome. Quinze représentants de l'Europe de petits
et des nouveaux
participaient à ce tour de table informel, annonciateur de débats houleux dans le cadre de la CIG (1). Conviés, les pays du Benelux ont préféré décliner l'invitation, estimant inopportun, à ce stade, de se joindre à un groupe précis
.
A l'issue de cette rencontre, qui a duré plusieurs heures, le gouvernement tchèque s'est félicité d'avoir obtenu un résultat positif
, constatant, de nombreux points de convergence entre les participants. Bien qu'elles n'aient pas abouti à la rédaction d'un cahier de doléances, les discussions de Prague auraient déjà mis en évidence deux griefs majeurs : la réforme des institutions, qui renforcerait le poids des grands pays
, et le projet de défense européenne, jugé inutilement concurrent de l'Otan.
Soucieux de préserver le compromis trouvé par Valéry Giscard d'Estaing avant l'été, Paris et Berlin ne cachent pas leurs inquiétudes. De passage à Prague la semaine dernière Joschka Fischer, le chef de la diplomatie allemande, a mis en garde les petits pays
contre toute remise en question des travaux de la Convention. Celui qui rouvre le consensus doit être capable de le récréer, a-t-il prévenu, sinon nous ferons face à une situation terrible.
De son côté, le premier ministre français Jean-Pierre Raffarin a rappelé, à Bruxelles, que la France voulait aller vite
dans les négociations de l'automne, ce qui implique, au mieux, quelques ajustements
, sans toucher aux acquis de fond du projet.
Hôte de la réunion, le gouvernement de Vaclav Klaus a beau minimiser la portée de son invitation, il reste fidèle à sa position, très critique à l'égard du texte de Giscard, qui, selon lui, marginalise les futurs pays membres, au seul bénéfice de Paris et Berlin. Dans le bras de fer diplomatique qui s'annonce Prague n'est pas sans appui. Le front du refus compte quinze pays sur les vingt-cinq que comptera l'Europe élargie. Parmi ses alliés de poids se trouve l'Espagne, l'Autriche, la Finlande et la Pologne, chef de file de la contestation à l'Est.
Conviée à Prague alors qu'elle figure parmi les puissances moyennes, la Pologne entend batailler avec fermeté pendant la CIG. Varsovie souhaiterait conserver l'équilibre des voix qu'elle avait obtenu dans le traité de Nice – décembre 2000 –, pourcentage balayé par le texte de Giscard, lequel avantagera à partir de 2009 les pays les plus peuplés, notamment l'Allemagne. Lors de la CIG, la Pologne compte bien sur l'appui de Madrid pour obtenir gain de cause. Malgré les promesses faites cet été aux Polonais par Ana Palacio, le ministre espagnol des Affaires étrangères, le gouvernement Aznar se serait rallié à une position modérée, afin de ne pas faire capoter la CIG. Reste le support plein et entier des pays Baltes et nordiques. La Finlande vient de publier une liste de revendications qu'elle présentera aujourd'hui aux députés à Strasbourg. Sceptique à l'égard d'une présidence stable du Conseil européen, Helsinki souhaiterait, comme beaucoup de petits pays, conserver un commissaire par État membre, solution rejetée par le compromis de Valéry Giscard d'Estaing. Sur ce point, la Finlande rejoint l'Autriche, très critique à l'égard de l'appétit de pouvoir des grands
.
(1) République tchèque, Pologne, Hongrie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Finlande, Danemark, Autriche, Irlande, Grèce, Estonie, Lituanie, Lettonie, Portugal.
Source : Le Figaro
Auteur :
Alexandrine Bouilhet
Quand l'Amérique Recrutait Des Officiers SS par Le Nouvel Observateur