La Corée du Nord, l'Iran et l'Irak développeraient des armes nucléaires, ce qui constitue une menace directe pour la paix mondiale selon les Etats-Unis. Pourtant, ces derniers envisagent de relancer leur programme nucléaire au mépris du traité de non-prolifération, qu'ils ont pourtant signé.
De Pyongyang à Bagdad, en passant par Paris et Washington, un terme fait frémir les chancelleries : nucléaire. Coup sur coup, rappelle “Le Temps”, la Corée du Nord a relancé son “chantage nucléaire face aux Etats-Unis en renvoyant les inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), en annonçant son retrait du traité de non-prolifération nucléaire et en redémarrant sa centrale de Yongbyon”. Selon le “Financial Times”, l'Iran tenterait de développer l'arme nucléaire à travers le programme civil qu'il est en train de mettre en place actuellement.
Comme si cela ne suffisait pas, “The Guardian” révèle que “l'administration Bush prévoit de tenir en août prochain une réunion avec l'état-major des armées et des scientifiques pour discuter de la construction d'une nouvelle génération d'armes nucléaires, incluant des ‘minibombes' et des bombes à neutrons. Cette réunion aura aussi pour objectif de relancer les tests nucléaires américains et de trouver un argumentaire pour convaincre l'opinion publique que la relance d'un tel programme est nécessaire.”
Cette annonce surprenante fait écho à la déclaration, le 12 février 2003, de George Tenet devant le Sénat américain, rapporte “The Washington Post”. Selon le patron de la CIA, “ces douze derniers mois, la Corée du Nord, l'Irak, l'Iran et la Libye ont tenté de se procurer des équipements pour produire des armes nucléaires”.
Aussi, le petit club des “nations nucléarisées” qui rassemble officiellement les Etats-Unis, la Russie, la Chine, la France et le Royaume-Uni — tous signataires du traité de non-prolifération nucléaire de 1968 — et, officieusement, l'Inde, le Pakistan et Israël — non signataires du TNP — risquerait donc rapidement de s'agrandir et de remettre en cause l'équilibre atomique fondé sur la dissuasion. De fait, ajoute “The Washington Post”, “cette nouvelle course aux armements menace surtout de ruiner plus de trois décennies d'efforts de non-prolifération”.
Washington banalise la bombe
Cependant, comme le défend George Tenet devant le Sénat, “l'ère où l'on encourageait par traité des pays à ne pas développer d'armes nucléaires touche sans doute à sa fin”. Une conclusion que l'administration Bush n'a pas de mal à reprendre à son compte car, dans sa nouvelle doctrine de sécurité nationale publiée en septembre 2002, les conventions et autres accords multilatéraux n'ont plus leur place. Les Etats-Unis se feront justice eux-mêmes en lançant des frappes préventives contre des Etats qui auraient le culot ne serait-ce que de les menacer. Ainsi en est-il de l'Irak. Très sérieusement, des stratèges de Washington “envisagent l'impensable : ils se préparent au possible recours à l'arme nucléaire en Irak”, rapporte le “Los Angeles Times”.
Pour Greg Mello, un antinucléaire cité par “The Guardian”, “il est encore impossible de prévoir l'effet que l'annonce de nouveaux plans nucléaire américains peut produire sur le TNP, le moratoire actuel des tests nucléaires…”, mais, poursuit Stephan Schwartz, un autre antinucléaire, “il serait particulièrement hypocrite de la part des Américains de demander à la Corée du Nord d'arrêter ses programmes nucléaires quand les Etats-Unis les relancent !”
Plus qu'une question d'image, c'est la banalisation du nucléaire qui est dangereuse, explique le “LA Times”. “Il est inquiétant de voir les Etats-Unis abaisser le seuil d'utilisation du nucléaire et faire ainsi disparaître ce qui distinguait les armes atomiques des armes conventionnelles.” De fait, le débat autour du nucléaire est plus que jamais d'actualité et l'enjeu, outre la paix mondiale, sera la relance ou non du traité de non-prolifération.
Auteur :
Courrier International
Le Rêve Américain par Anjive